Ces vers ne sont aussi qu’un fragment tronqué d’une longue contemplation sur les destinées de l’homme. Elle était adressée à une femme jeune, malade, découragée de la vie, et dont les espérances d’immortalité étaient voilées dans son cœur par le nuage de ses tristesses. Moi-même j’étais plongé alors dans la nuit de l’âme ; mais la douleur, le doute, le désespoir, ne purent jamais briser tout à fait l’élasticité de mon cœur souvent comprimé, toujours prêt à réagir contre l’incrédulité et à relever mes espérances vers Dieu. Le foyer de piété ardente que notre mère avait allumé et soufflé de son haleine incessante dans nos imaginations d’enfant, paraissait s’éteindre quelquefois au vent du siècle et sous les pluies de larmes des passions : la solitude le rallumait toujours. Dès qu’il n’y avait personne entre mes pensées et moi, Dieu s’y montrait, et je m’entretenais pour ainsi dire avec lui. Voilà pourquoi aussi je revenais facilement de l’extrême douleur à la complète résignation. Toute foi est un calmant, car toute foi est une espérance, et toute espérance rend patient. Vivre, c’est attendre.