Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 1.djvu/409

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
407
POÉTIQUES.

Et du regard dont tu m’enivres
Me fais mourir, me fais revivre ;
De quoi te plains-tu sur mon cœur ?

Plus jeune que la jeune Aurore,
Plus limpide que ce flot pur,
Ton âme au bonheur vient d’éclore,
Et jamais aucun souffle encore
N’en a terni le vague azur.

Cependant si ton cœur soupire
De quelque poids mystérieux,
Sur tes traits si la joie expire,
Et si tout près de ton sourire
Brille une larme dans tes yeux,

Hélas ! c’est que notre faiblesse,
Pliant sous sa félicité
Comme un roseau qu’un souffle abaisse,
Donne l’accent de la tristesse
Même au chant de la volupté ;

Ou bien peut-être qu’avertie
De la fuite de nos plaisirs,
L’âme en extase anéantie
Se réveille et sent que la vie
Fuit dans chacun de nos soupirs.

Ah ! laisse le zéphyr avide
À leur source arrêter tes pleurs ;