Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 10.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dira que vous étiez complice : ma fuite vous accusera. J’aime mieux mourir. » Il partit pour la cour nationale d’Orléans : il ne fut pas jugé, il fut assassiné à Versailles le 6 septembre. Sa tête, enroulée de ses cheveux blancs, fut plantée au bout d’une des piques de la grille du palais. Dérision atroce de cette fidélité chevaleresque qui gardait, après la mort, la porte de la demeure de ses rois.


III

Les premières insurrections de la Révolution étaient des mouvements spontanés du peuple. D’un côté le roi, la cour et la noblesse ; de l’autre la nation. Ces deux partis en présence s’entre-choquaient par la seule impulsion des idées, des intérêts contraires. Un mot, un geste, un hasard, un ressemblement de troupes, un jour de disette, un orateur véhément haranguant la foule au Palais-Royal, suffisaient pour entraîner les masses à l’émeute ou pour les faire marcher sur Versailles. L’esprit de sédition se confondait avec l’esprit de la Révolution. Tout le monde était factieux, tout le monde était soldat, tout le monde était chef. C’était la passion publique qui donnait le signal. C’était le hasard qui commandait.

Depuis que la Révolution était faite et que la constitution, réciproquement jurée, imposait aux partis un ordre légal, il en était autrement. Les soulèvements du peuple n’étaient plus des agitations, mais des plans. Les factions