Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 10.djvu/30

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J’avais voulu forcer le roi à fuir avec le Dauphin de Versailles ; mais Versailles n’est pas la France. Le roi eût retrouvé son armée et la nation hors de cette ville, et mon ambition aurait eu pour unique effet la guerre civile et la dictature militaire donnée au roi. Mais le comte de Provence restait. Il était l’héritier naturel du trône abandonné. Il était populaire, il avait passé avec moi du côté des communes ; j’aurais donc travaillé pour lui ! Mais le comte d’Artois était en sûreté à l’étranger ; mais ses enfants étaient avec lui à l’abri de mes prétendus meurtres ! Ils étaient plus près du trône que moi ! Quelle série de folies, d’absurdités ou de crimes perdus ! Le peuple français n’a changé, par la Révolution, ni de sentiment ni de caractère. J’aime à croire que le comte d’Artois, que j’ai aimé moi-même, en fera l’épreuve ; j’aime à croire que, se rapprochant d’un roi qu’il chérit et dont il est tendrement aimé, d’un peuple à l’amour duquel ses brillantes qualités lui donnent tant de droits, il reviendra, après nos troubles apaisés, jouir de cette partie de son héritage, l’amour que la nation la plus sensible et la plus aimante a voué aux enfants d’Henri IV. »


XI

Ces raisons, entrecoupées sans doute de quelques repentirs, fortifiées de ces larmes d’attendrissement, de ces attitudes et de ces gestes plus persuasifs que la parole, qui donnent tant de pathétique et tant d’émotion à de si solen-