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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/292

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XXIV

Un silence de stupeur suivit ce discours. Marat, qui avait surpassé en audace Danton, et surtout Robespierre, avait dominé ses deux rivaux et étonné la Convention. Seul contre tous, il avait osé parler en tribun qui se dévoue aux poignards d’une assemblée de patriciens, sûr que le peuple est à la porte pour le défendre ou pour le venger. Ses paroles distillaient le sang du 2 septembre. Il demandait un bourreau national pour toute institution. Le crime dans sa bouche avait une telle confiance, la fureur dans son âme ressemblait tellement au sang-froid d’un homme d’État, qu’il était dangereux et lâche de laisser une assemblée à son début flottante entre l’horreur et l’admiration, et qu’il fallait lui arracher une protestation unanime contre ce théoricien du meurtre. Le peuple aurait cru ou qu’on craignait ou qu’on admirait Marat. Vergniaud recueillit son horreur, et gravit, la tête inclinée, les marches de la tribune.


XXV

« S’il est un malheur pour un représentant du peuple, dit-il d’une voix affaissée, c’est sans doute celui d’être