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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/44

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pagnes de la Vendée seules s’agitèrent et firent éclater quelques symptômes de guerre civile. Partout ailleurs les royalistes et les constitutionnels, consternés, cachèrent leurs pressentiments et leur douleur. Les Girondins et les Jacobins se coalisèrent pour faire nommer à la Convention par les assemblées primaires des hommes extrêmes, d’une trempe antique, irréconciliables avec la royauté. La France sentait que l’heure des conseils timides était passée pour elle, et que la patrie n’avait plus de remparts que ses baïonnettes. Il lui fallait dans ses conseils comme sur ses frontières des hommes qui ne pussent pas regarder derrière eux. Elle cherchait ces hommes, elle les trouva, elle les nomma. Elle leur donna pour unique mandat le salut de la nation et le salut de la liberté.

L’armée, commandée par des généraux constitutionnels et par des officiers encore attachés au roi, reçut avec stupeur la nouvelle inattendue du renversement de la constitution et du triomphe des Jacobins. Il y eut quelques moments d’hésitation, dont un chef habile et accrédité aurait pu s’emparer pour l’entraîner contre Paris ; mais la victoire n’avait encore donné à aucun général le droit de désobéir à un mouvement populaire. Le vieux Luckner, commandant en chef, interrogé à Metz par la municipalité et par le club sur le parti qu’il ferait prendre à l’armée, balbutia une approbation vague du coup d’État de Paris. Le lendemain, ayant reçu de La Fayette, son lieutenant, un avis contraire, il changea de langage et harangua ses troupes pour les prémunir contre les instigateurs de désordre qui allaient arriver de Paris. Vieux mannequin de guerre inhabile à comprendre la politique, Luckner balbutiait comme un enfant tout ce qu’on lui soufflait. L’arrivée des commis-