Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dont le cœur est mobile et profond comme l’eau,
Dont le moindre contact fait frissonner la peau,
Dont la pensée, en proie à un sacré délire,
S’ébranle au doigt divin, chante comme une lyre ;
Mélodieux échos semés dans l’univers,
En comprenant la langue, en notant les concerts :
C’est dans leur transparente et limpide pensée
Que l’image infinie est le mieux retracée,
Et que la vaste idée où l’Éternel se peint
D’ineffables couleurs s’illumine et se teint !
Ceux-là, fuyant la foule et cherchant les retraites,
Ont avec le désert des amitiés secrètes ;
Sur les grèves des flots en égarant leurs pas,
Ils entendent des voix que nous n’entendons pas :
Ils savent ce que dit la foudre dans sa course,
La vague au sable d’or, le rocher à la source,
Le bulbul à l’aurore, aux forêts le zéphyr,
Et dans le cœur humain le plus faible soupir.
Les cornes des béliers rayonnent sur leurs têtes ;
Écoutez-les prier, car ils sont vos prophètes :
Sur l’écorce, ou la pierre, ou l’airain, écrivez
Leurs hymnes les plus saints pour l’avenir gravés :
Chargez-en des enfants la mémoire docile,
Comme d’un vase neuf on parfume l’argile ;
Et que le jour qui meurt dise aux jours remontants
Le cri de tous les jours, la voix de tous les temps !
C’est ainsi que de Dieu l’invisible statue,
De force et de grandeur et d’amour revêtue,
Par tous ces ouvriers dont l’esprit est la main,
Grandira d’âge en âge aux yeux du genre humain,