Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 2.djvu/111

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’onde éteint les débris, l’air emporte le bruit,
Et l’Océan n’est plus que silence et que nuit.


XX


Mais sur les flots obscurs quel son renaît, expire,
Et comme un cri plaintif roule autour du navire ?
Serait-ce… ? Harold, rebelle aux cris des matelots,
Reconnaît une voix,… s’élance au sein des flots,
Nage au bruit, voit flotter sur la nuit de l’abîme
Un débris qu’embrassait une jeune victime,
L’arrache aux flots jaloux, l’emporte triomphant,
Et revient sur le pont déposer… une enfant.
Essuyant ses beaux yeux du flot qui les inonde,
De ses cheveux trempés il fait ruisseler l’onde,
La réchauffe aux rayons d’un foyer rallumé,
Et, sous son vêtement à demi consumé,
Aux anneaux d’un collier qui pend sur sa poitrine,
Il découvre un portrait !… Il le prend, il s’incline ;
Aux lueurs de la flamme il contemple… Grands dieux !
Ces traits !… sont ceux d’Harold !!! Il n’en croit pas ses yeux.
« Quel est ton nom ? — Adda. — Ton pays ? — Épidaure.
— Ta mère ? — Éloydné. — Ton père ? — Je l’ignore :
Ma mère, en expirant sous le glaive assassin,
Cacha, sans le nommer, son image en mon sein.
On dit qu’un étranger… Mais qui sait ce mystère ?
— C’est assez, dit Harold ; va, je serai ton père ! »
Et, pressant sur son cœur l’enfant abandonné,
Il murmurait tout bas le nom d’Éloydné,
Soit qu’il sût le secret de sa triste naissance,
Soit qu’il fût attendri des grâces de l’enfance,