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se plaît à lui donner. En effet, une chose qui, par sa nature, n’offense ni un individu ni une nation, n’est point une injure ; jamais une vague déclamation contre les vices d’un siècle ou d’un peuple n’a offensé réellement une nation ou une époque ; et jamais ces déclamations, quelque violentes, quelque injustes qu’on les suppose, n’ont été sérieusement reprochées à leurs auteurs : l’opinion, juste en ce point, a senti que ce qui frappait dans le vague était innocent, par là même que cela ne nuisait à personne…

» Plaçons ici une observation plus personnelle. Si le chant de Child-Harold était le début d’un auteur complétement inconnu, si la vie et les ouvrages de M. de Lamartine étaient totalement ignorés, on comprendrait plus aisément peut-être l’erreur qui lui fait attribuer aujourd’hui les sentiments qu’il désavoue. Mais s’il perce dans tous ses écrits précédents un goût de prédilection pour une contrée de l’Europe, à coup sûr c’est pour l’Italie : dans vingt passages de ses ouvrages il témoigne pour elle le plus vif enthousiasme, il ne cesse d’y exalter cette terre du soleil, du génie et de la beauté :


Voluptueux vallon, qu’habita tour à tour

Tout ce qui fut grand dans le monde !

(Méditation XXIV.)


d’en appeler à ses immortels souvenirs :


Mais dans ton sein l’âme agrandie

Croit sur leurs monuments respirer leur génie !

(Id.)


de célébrer sa gloire et même ses ruines : voyez le morceau intitulé Rome, dédié à la duchesse de Devonshire. Si du poëte nous passons à l’homme, nous voyons que M. de Lamartine a passé en Italie, et par choix, les premières années de sa jeunesse ; qu’il y revient sans cesse à différentes époques, qu’il y revient encore aujourd’hui. Qu’on rabaisse son talent poétique tant qu’on voudra, il n’y attache pas lui-même plus de prix qu’il n’en mérite : mais si on veut bien lui accorder au moins le bon sens le plus vulgaire et le plus usuel, comment supposera-t-on que si la haine qu’on lui impute était dans son cœur, que s’il avait pré-