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AVERTISSEMENT.

senti, tout le monde l’a dit ; et c’est sans doute le genre d’éloge auquel l’auteur a été le plus sensible. Quelques vers pris isolément, ou détachés de l’ensemble qui les explique, peuvent donner lieu sans doute à des interprétations du genre de celles que nous combattons ici ; mais un vers, une stance, ne forment pas plus le sens d’un morceau de poésie, qu’un son isolé ne forme un concert : c’est l’accord qu’il faut juger.

Quoi qu’il en soit, et pour ôter tout prétexte à de semblables méprises, nous croyons devoir prévenir ici le lecteur, au nom de M. de Lamartine, que la liberté, qu’invoque dans ce nouvel ouvrage la muse de Child-Harold, n’est point celle dont le nom profané a retenti depuis trente ans dans les luttes des factions, mais cette indépendance naturelle et légale, cette liberté, fille de Dieu, qui fait qu’un peuple est un peuple, et qu’un homme est un homme ; droit sacré et imprescriptible dont aucun abus criminel ne peut usurper ou flétrir le beau nom. Quant au ton plus réel de scepticisme qui se retrouve dans quelques morceaux de ce dernier chant de Child-Harold, il est inutile de faire remarquer qu’il se trouve uniquement dans la bouche du héros, que, d’après ses opinions trop connues, l’auteur français ne pouvait faire parler contre la vraisemblance de son caractère. Satan, dans Milton, ne parle point comme les anges. L’auteur et le héros ont deux langages fort opposés ; et M. de Lamartine serait très-affligé qu’on pût l’accuser, même injustement, d’avoir fait naître le plus léger doute sur ses intentions, ou d’avoir répandu l’ombre d’un nuage sur des convictions religieuses qui sont les siennes, et qu’il regarde avec raison comme la seule lumière de la vie et le plus précieux trésor de l’homme.