Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/116

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sein, je’savais discerner, dès cette époque, l’esprit de séduction, d’orgueil et de domination qui se cache ou qui se révèle à propos dans leur politique, et qui, en immolant chaque membre au corps et en confondant ce corps avec la religion, se substitue habilement à Dieu même et aspire à donner à une secte le gouvernement des consciences et la monarchie universelle de la conscience humaine. Mais ces vices abstraits de l’institution ne m’autorisent pas à effacer de mon cœur la vérité, la justice et la reconnaissance pour les mérites et pour les vertus que j’ai vus respirer et éclater dans leur enseignement et dans les maîtres chargés par eux du soin de notre enfance. Le mobile humain se sentait dans leurs rapports avec le monde ; le mobile divin se sentait dans leurs rapports avec nous.

Leur zèle était si ardent qu’il ne pouvait s’allumer qu’à un principe surnaturel et divin. Leur foi était sincère, leur vie pure, rude, immolée à chaque minute et jusqu’à la fin au devoir et à Dieu. Si leur foi eût été moins superstitieuse et moins puérile, si leurs doctrines eussent été moins imperméables à la raison, ce catholicisme éternel, je verrais dans les hommes que je viens de citer les maîtres les plus dignes de toucher avec des mains pieuses l’âme délicate de la jeunesse ; je verrais dans leur institut l’école et l’exemple des corps enseignants. Voltaire, qui fut leur élève aussi, leur rendit la même justice. Il honora les maîtres de sa jeunesse dans les ennemis de la philosophie humaine. Je les honore et je les vénère dans leurs vertus, comme lui. La vérité n’a jamais besoin de calomnier la moindre vertu pour triompher par le mensonge. Ce serait la un jésuitisme de la philosophie. C’est par la vérité que la raison doit triompher.