Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/161

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Un soleil étincelant moirait la mer de rubans de feu et se réverbérait sur les maisons blanches d’une côte inconnue. Une légère brise, qui venait de cette terre, faisait palpiter la voile sur nos têtes et nous poussait d’anse en anse et de rocher en rocher. C’était la côte dentelée et à pic de la charmante île d’Ischia, que je devais tant habiter et tant aimer plus tard. Elle m’apparaissait, pour la première fois, nageant dans la lumière, sortant de la mer se perdant dans le bleu du ciel, et éclose comme d’un rêve de poète pendant le léger sommeil d’une nuit d’été…


V


L’île d’Ischia, qui sépare le golfe de Gaëte du golfe de Naples, et qu’un étroit canal sépare elle-même de l’île de Procida, n’est qu’une seule montagne à pic dont la cime blanche et foudroyée plonge ses dents ébréchées dans le ciel. Ses flancs abrupts, creusés de vallons, de ravines, de lits de torrents, sont revêtus du haut en bas de châtaigniers d’un vert sombre. Ses plateaux les plus rapprochés de la mer et inclinés sur les flots portent des chaumières, des villas rustiques et des villages à moitié cachés sous les treilles de vigne. Chacun de ces villages a sa marine, on appelle ainsi le petit port où flottent les barques des pêcheurs de l’île et où se balancent quelques mâts de navires à voile latine. Les vergues touchent aux arbres et aux vignes de la côte.

Il n’y a pas une de ces maisons suspendues aux pentes de la montagne, cachée au fond de ses ravins, pyramidant sur un de ses plateaux, projetée sur un