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mais il n’en exagéra point la valeur et le marché fut conclu pour trente deux sequins d’or que mon ami lui paya comptant. Moyennant cette somme, le bateau et un gréement tout neuf, voiles, jarres, cordages, ancre de fer tout fut à nous.

Nous complétâmes même l’équipement en achetant dans une boutique du port deux capotes de laine rousse, une pour le vieillard, l’autre pour l’enfant ; nous y joignîmes des filets de diverses espèces, des paniers à poissons et quelques ustensiles grossiers de ménage à l’usage des femmes. Nous convînmes avec le marchand de barques que nous lui payerions le lendemain trois sequins de plus si l’embarcation était conduite le jour même au point de la côte que nous lui désignâmes. Comme la bourrasque baissait et que la terre élevée de l’île abritait un peu la mer du vent de ce côté, il s’y engagea, et nous repartîmes par terre pour la maison d’Andréa.


XIX


Nous fîmes la route lentement, nous asseyant sous tous les arbres, à l’ombre de toutes les treilles, causant, rêvant, marchandant à toutes les jeunes procitanes les paniers de figues, de nèfles, de raisins qu’elles portaient, et donnant aux heures le temps de couler. Quand, du haut d’un promontoire, nous aperçûmes notre embarcation qui se glissait furtivement sous l’ombre de la côte, nous pressâmes le pas pour arriver en même temps que les rameurs.

On n’entendait ni pas ni voix dans la petite maison et dans la vigne qui l’entourait. Deux beaux pigeons aux