Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rine ! Vous des poètes ! et vous ne savez pas même pincer une note sur la guitare. Avec quoi donc accompagnerez-vous les chansons que vous ferez ? »

Puis elle secouait la tête en faisant la moue avec ses lèvres et en s’impatientant de ce que nous ne voulions pas dire la vérité.


X


Quelquefois un vilain soupçon traversait son âme et jetait du doute et une ombre de crainte dans son regard. Mais cela ne durait pas. Nous l’entendions dire tout bas à sa grand-mère : « Non, cela n’est pas possible, ce ne sont pas des réfugiés chassés de leur pays pour une mauvaise action. Ils sont trop jeunes et trop bons pour connaître le mal. » Nous nous amusions alors à lui faire le récit de quelques forfaits bien sinistres, dont nous nous déclarions les auteurs. Le contraste de nos fronts calmes et limpides, de nos yeux sereins, de nos lèvres souriantes et de nos cœurs ouverts, avec les crimes fantastiques que nous supposions avoir commis, la faisait rire aux éclats ainsi que son frère, et dissipait vite toute possibilité de défiance.


XI


Graziella nous demandait souvent qu’est-ce que nous lisions donc tout le jour dans nos livres. Elle croyait que c’étaient des prières, car elle n’avait jamais vu de livres