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tien avec lui, en présence de M. de Pradt, l’archevêque de Malines, et quelques hommes de la cour impériale. L’empereur fut très-mécontent de cet entretien. « Que voulez-vous être ? dit-il en terminant. Rien, Sire, » répondit mon oncle. l’empereur se retourna avec un geste de colère. Il se défiait de ceux qui ne lui demandaient rien, parce qu’ils voulaient garder leur âme à eux.


XXII


Tel était le chef redouté et presque absolu de notre famille. Il régnait sur l’opinion du pays par la haute et juste considération dont il était entouré ; il régnait sur ses deux sœurs par le culte d’affection, de respect et d’obéissance qu’elles lui portaient ; il régnait sur mon père par la supériorité d’âge, de fortune, et par cette vieille habitude de déférence que les cadets avaient reçue comme un commandement de Dieu, par tradition, envers les aînés, destinés sous l’ancien régime au gouvernement absolu de la famille ; il régnait sur ma mère par le soin maternel qu’elle avait et qu’elle devait avoir de ménager en lui l’avenir de ses enfants dépendant de lui ; il devait vouloir naturellement régner aussi et surtout sur moi, seul fils de la famille qui pût porter et perpétuer son nom.