Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/467

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et qui commencèrent ce siècle. C’était une alluvion de l’ancien régime et de l’ancienne société, déposée par la révolution sur ce bord de la Saône. Voici comment cette alluvion s’était tout naturellement formée là. Il y avait à Mâcon, avant 1789, un évêché immensément riche, dont le titulaire présidait les états du Mâconnais et rassemblait dans son palais épiscopal toutes les notabilités de la province. Le dernier évêque était un homme d’esprit, de plaisir et de luxe beaucoup plus qu’homme d’Église. Sa maison était un centre de délicatesse, de galanteries, d’élégance et de lettres : arbíter elegantiarum. Il dépensait quatre cent mille livres de rentes ecclésiastiques en munificences et en fêtes. Il écrasait de son luxe la noblesse du pays, qui s’efforçait de rivaliser avec lui de splendeur et qui aurait voulu l’effacer.

Il y avait de plus deux chapitres de chanoines nobles qui possédaient des revenus considérables en canonicats, en prieurés, en prébendes, budget territorial immense alors du culte de l’État. Ces chanoines, appartenant en général aux grandes familles de la ville, de la province ou des provinces limitrophes, étaient désœuvrés, riches, amateurs de plaisir et de réunions à la ville et la campagne, toujours prêts à faire nombre, mouvement et joie dans la société. C’était une permanente garnison de l’Église, composée d’abbés de tout âge, qui recrutait les châteaux et les salons.

Il y avait, en outre, deux maisons de haute noblesse qui dominaient tout et qui égalaient le luxe des princes. L’une de ces maisons était celle du comte de Montrevel, qui n’allait jamais à la cour, et qui mangeait six cent mille livres de rente à Mâcon. Il avait une écurie de cent chevaux de chasse, un théâtre et une musique à