Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 3.djvu/289

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Les globes calcinés volent en étincelles,
Les étoiles des nuits éteignent leurs prunelles,
La comète s’échappe et brise ses essieux ;
Elle lance en éclats la machine céleste,
Et de mille univers, en un souffle, il ne reste

Qu’un charbon fumant dans les cieux !


Et vous, qui ne pouvez défendre un pied de grève,
Dérober une feuille au souffle qui l’enlève,
Prolonger d’un rayon ces orbes éclatants,
Ni dans son sablier, qui coule intarissable,
Ralentir d’un moment, d’un jour, d’un grain de sable,

La chute éternelle du temps ;


Sous vos pieds chancelants si quelque caillou roule,
Si quelque peuple meurt, si quelque trône croule,
Si l’aile d’un vieux siècle emporte des débris,
Si de votre alphabet quelque lettre s’efface,
Si d’un insecte à l’autre un brin de paille passe,

Le ciel s’ébranle de vos cris !


II


Regardez donc, race insensée,
Les pas des générations !
Toute la route n’est tracée
Que des débris des nations :
Trônes, autels, temples, portiques,
Peuples, royaumes, républiques,
Sont la poussière du chemin ;
Et l’histoire, écho de la tombe,
N’est que le bruit de ce qui tombe
Sur la route du genre humain.