Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 3.djvu/55

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Et tu meurs ? Et ta foi dans un lit de nuages
S’enfonce pour jamais sous l’horizon des âges,
Comme un de ces soleils que le ciel a perdus,
Dont l’astronome dit : « C’était là qu’il n’est plus ! »
Et les fils de nos fils, dans les lointaines ères,
Feraient aussi leur fable avec tes saints mystères,
Et parleraient un jour de l’Homme de la croix
Comme des dieux menteurs disparus à ta voix,
De ces porteurs de foudre ou du vil caducée,
Rêves dont au réveil a rougi la pensée ?

Mais tous ces dieux, ô Christ, n’avaient rien apporté
Qu’une ombre plus épaisse à notre obscurité ;
Mais, du délire humain lâche et honteux symbole,
Ils croulèrent au bruit de ta sainte parole ;
Mais tu venais asseoir sur leur trône abattu
Le Dieu de vérité, de grâce et de vertu !
Leurs lois se trahissaient devant les lois chrétiennes :
Mais où sont les vertus qui démentent les tiennes ?
Pour éclipser ton jour quel jour nouveau paraît ?
Toi qui les remplaças, qui te remplacerait ?





Ah ! qui sait si cette ombre où pâlit ta doctrine
Est une décadence — ou quelque nuit divine,
Quelque nuage faux prêt à se déchirer,
Où ta foi va monter et se transfigurer,
Comme aux jours de ta vie humaine et méconnue
Tu te transfiguras toi-même dans la nue,
Quand, ta divinité reprenant son essor,
Un jour sorti de toi revêtit le Thabor,