Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/365

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calier du grenier à foin où il y avait la chambre que Cyprien m’avait autrefois montrée pour moi, et je vis l’ombre d’une quatrième femme se dessiner sur la place éclairée du soleil où j’étais à genoux, et se joindre au groupe des trois femmes qui me regardaient, à côté de la porte.

« — Oh ! non, que nous ne vous en voulons pas, allez ! reprit le vieillard, de ne pas avoir été notre bru ; nous en remercions Dieu tous les jours, au contraire. Quelle renommée auriez-vous apportée dans un pays de braves gens comme le nôtre !

« — Oh ! non, que Cyprien ni nous, nous ne vous en voulons pas ! répéta la vieille femme. Le bon Dieu nous a bien protégés, au contraire, en vous perdant comme il l’a fait, avant que notre nom fût mêlé avec le vôtre, comme de l’eau de roche avec l’eau du ruisseau ! Allez, mam’selle Geneviève, allez, mauvaise fille et mauvaise mère, allez manger ailleurs le morceau de pain qu’on va vous jeter, et remarquez bien le chemin pour n’y pas repasser. Il y a des gens qui ne peuvent jamais aller là où ils peuvent être reconnus !

« — Geneviève ! s’écria une voix qui me tinta dans les oreilles comme si ç’avait été la cloche de mon baptême ou de ma première communion ; Geneviève ! Quoi ! cette fille nue et mendiante que vous insultez ainsi depuis une heure et qui grelotte à vos genoux, c’est Geneviève ?… Ah ! vous devriez être aux siens ! »

« En disant cela, elle fendit précipitamment le groupe des trois femmes, du vieillard et de Cyprien, pour me prendre dans ses bras. « Ah bien ! je n’en rougis pas d’elle, moi ! » qu’elle ajouta.

« Je levai la tête, j’ouvris les yeux à cette voix et à ce mouvement, et à travers mes larmes, qui m’aveuglaient