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ans, qui s’appuyait sur un bâton de bois blanc plus haut que lui, et qui pliait sous un gros sac de toile de chanvre attaché sur ses épaules par deux bretelles de cuir.

Il y avait eu un grand orage dans la soirée. Le sac, les habits, le chapeau de feutre blanc et les cheveux pendants de l’enfant ruisselaient comme s’il était sorti de la fontaine.

Geneviève jeta au feu, qui allait s’éteindre, une brassée de branches de pin, d’où jaillit à l’instant une grande flamme résineuse ; elle coupa une tranche de pain sur le bout de la table, tira du buffet le reste de la salade du soir, et versa dans un verre un doigt de vin. Pendant ce temps-là, l’enfant défaisait ses bretelles, ôtait sa veste, secouait son chapeau et retournait son sac sur une chaise de bois, devant la flamme du foyer, pour faire sécher la toile.


CXXXIV


Je le regardais en souriant, ce petit voyageur, qui faisait déjà seul le tour de ces sauvages montagnes, et qui aurait été obligé de faire deux ou trois de ses petits pas pour franchir une des grosses fourmilières que l’on rencontre dans ces bois de sapins.

C’était une des plus charmantes et des plus touchantes figures féminines d’enfant que j’eusse jamais vues dans ma vie. De grands yeux noirs avec des cils qui faisaient ombre sur sa paupière inférieure, rappelant cette ombre artificielle dont les femmes d’Orient en bordent leurs yeux pour en relever l’éclat ; une bouche entr’ouverte comme celle de tous les enfants, qui semblent avoir à aspirer toute