de la cour ; seulement elle restreint autour d’elle, comme un rempart contre la licence générale des esprits et des mœurs, un petit concile d’hommes et de femmes qui faisaient, par leur sévérité, exception au temps. Ses amis les plus intimes à cette époque étaient madame de Scudéri, tante de mademoiselle de Scudéri, veuve comme madame de Sévigné à trente ans : elle avait épousé un vieillard qu’elle avait aimé malgré son âge, et elle se refusait, comme madame de Sévigné, à de nouveaux liens ; madame de La Fayette, que son attachement au duc de La Rochefoucauld tenait dans un éloignement de la cour, semblable à un blâme muet ; madame de Guénégaud, parente et voisine des Arnauld, au château de Fresnes, près de Livry ; enfin les Arnauld eux-mêmes, les anciens amis de Fouquet et les patrons de Pascal. Elle passa. l’été de 1667 dans cet air sain et vivifiant au château de Fresnes.
« Il faut que je vous dise comme je suis, écrit-elle à M. de Pomponne, membre de cette famille des Arnauld et ambassadeur alors en Suède. J’ai M. d’Andilly à ma main gauche, c’est-à-dire du côté de mon cœur ; j’ai madame de La Fayette à ma droite ; madame de Guénégaud devant moi, qui s’amuse à barbouiller de petites images ; un peu plus loin, madame de Motteville (l’auteur des Mémoires), qui rêve profondément ; notre oncle de Cessac, que je crains parce que je ne le connais guère ; madame de Caderousse ; mademoiselle sa sœur, qui est un fruit nouveau que vous ne connaissez pas, et mademoiselle de Sévigné sur le tout, allant et venant par le cabinet comme de petits frelons : je suis assurée que cette compagnie vous plairait comme à moi. »
Ce portrait de famille unissait dans ses personnages le vieux siècle au nouveau. Le chef de la famille des Arnauld d’Andilly, âgé à peu près de quatre-vingts ans, avait vu