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LIVRE PREMIER. 25


VII


Ainsi s’écoulèrent ces mois de garnison à Beauvais ; puis vint le temps de service qui nous rappela à Paris. Je me gardai bien de me loger au quartier du quai d’Orsay, encore insuffisant pour nous contenir tous. Je continuai à, me loger seul à l’hôtel du Hasard, rue du Hasard, près de la rue Richelieu. J’y vivais indépendant, excepté les jours de service. Ce service consistait monter la garde à la porte du roi, dans le palais des Tuileries, et à l’accompagner à cheval dans les courses lointaines et rapides qu’il faisait tous les jours dans les environs de Paris. Je fus choisi une fois de préférence, avec un de mes camarades, pour accompagner Louis XVIII dans la visite qu’il voulut faire du Musée français pour connaître et apprécier ses richesses. Cette visite dura trois heures, pendant lesquelles le roi, M. de Forbin et M. Denon, trois hommes d’esprit et de goût, échangèrent en notre présence tout l’agrément et toute l’érudition artistique d’amateurs consommés des belles choses. Nous touchions a la chaise roulante dans laquelle le roi était traîné par deux de ses valets de pied, à cause de ses infirmités. Son beau regard, qui tombait souvent sur nous, comme pour nous associer à l’intention de ses mots fins et spirituels, nous mettait dans une espèce de familiarité avec lui. Il ne nous interdisait pas le sourire ; il semblait jouir de l’effet qu’il produisait sur nous. Il parut me remarquer, mais il ne s’informa pas de mon nom. Quelques années après, lors-