Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 4.djvu/392

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
391
neuvième époque.

Les enfants, enfonçant les pas dans son ornière,
Sur sa trace, en jouant, ramassent la poussière
Que de leur main étroite ils laissent retomber,
Et que les passereaux viennent leur dérober.
Le froment répandu, l’homme attelle la herse,
Le sillon raboteux la cahote et la berce :
En groupe sur ce char les enfants réunis
Effacent sous leur poids les sillons aplanis.
Le jour tombe, et le soir sur les herbes s’essuie ;
Et les vents chauds d’automne amèneront la pluie,
Et les neiges d’hiver sous leur tiède tapis
Couvriront d’un manteau de duvet les épis ;
Et les soleils dorés en jauniront les herbes,
Et les filles des champs viendront nouer les gerbes,
Et, tressant sur leurs fronts les bluets, les pavots,
Iront danser en chœur autour des tas nouveaux ;
Et la meule broîra le froment sous les pierres ;
Et, choisissant la fleur, la femme des chaumières,
Levée avant le jour pour battre le levain,
De ses petits enfants aura pétri le pain ;
Et les oiseaux du ciel, le chien, le misérable,
Ramasseront en paix les miettes de la table ;
Et tous béniront Dieu, dont les fécondes mains
Au festin de la terre appellent les humains !


C’est ainsi que ta providence
Sème et cueille l’humanité,
Seigneur, cette noble semence
Qui germe pour l’éternité.
Ah ! sur les sillons de la vie
Que ce pur froment fructifie !