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FIOR D’ALIZA.

laisser vivre, et lui expliquant, ainsi qu’aux bûcherons, que nos quatre vies tenaient aux racines et aux branches de ce toit nourricier de leurs pères. Ah ! si vous les aviez entendues, monsieur, demander aux bûcherons avec quoi elles me nourriraient dans cette cabane, désormais sans le moindre champ à cultiver autour des murs ? sur quoi elles coucheraient leur pauvre petit troupeau, dont les feuilles du châtaignier étaient la nourriture et toute la litière ! Il y avait de quoi fendre le tronc de l’arbre, mais non le cœur de l’homme de loi.

Cependant il faut être juste, les bûcherons semblaient attendris en voyant cette belle jeune fille, inondée de larmes jusqu’au bout des mèches de ses cheveux épars sur son sein d’enfant. Ils se regardaient entre eux, ils comprenaient cette misère, ils regardaient la masse, la magnificence et la verte vieillesse féconde de l’arbre ; ils détournaient le tranchant de leurs haches sur lesquelles quelques gouttes de leurs yeux tombaient silencieusement.

— Allons, à l’ouvrage ! dit l’homme de loi.

Les bûcherons semblent hésiter à obéir : l’un dit qu’il ajuste le manche de sa hache, l’autre que les dents de sa scie ne mordent pas.