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FIOR D’ALIZA.

L’ancien ambassadeur de Prusse, Luchesini, homme d’une finesse et d’une grâce qui voilaient son habileté consommée, me rappelait au delà des Alpes et des Appenins la figure et la sagacité du prince de Talleyrand. Le marquis de Bombelles était l’ambassadeur d’Autriche. Fils de M. de Bombelles, émigré français rentré avec le roi et devenu, depuis la mort de sa femme, évêque d’Amiens, il était resté au service de l’empereur François. C’était un homme d’un esprit très-expert et d’un caractère très-agréable, mais d’autant plus hostile à la France que, étant lui-même Français d’origine, il avait plus à cœur de paraître servir son souverain allemand par une opposition innée à tout ce qui pouvait rappeler la constitution semi-révolutionnaire dans le gouvernement de Louis XVIII. Il avait épousé et amené à Florence une jeune et belle Danoise, la fameuse Ida Brown, devenue comtesse de Bombelles, aussi bonne que belle, douée d’une voix et d’un talent musical égaux peut-être aux charmes de madame de Malibran, rassemblant presque tous les jours dans son salon les admirateurs passionnés de sa personne et de son art. On en sortait enivré. Sa simplicité candide la défendait contre l’enthousiasme qu’inspiraient sa jeunesse, sa beauté et sa voix. Elle n’éprouvait et n’inspirait que l’amitié. Elle en conçut une très-vive pour ma femme et pour moi.