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mille du rivage, et non loin du brick de guerre le Génie, qui a fait la même marche.

Journée de repos sur une mer toujours agitée, et aux coups du vent qui siffle dans nos mâts. Nous descendons sur la côte ; c’est le plus joli site que nous ayons encore visité en Grèce : de hautes montagnes dominent le paysage ; elles gardent encore quelques couches de terre, quelques pelouses d’un vert pâle, sur leurs flancs arrondis ; elles descendent mollement, et cachent leurs pieds dans quelques bois d’oliviers ; plus loin, elles s’étendent en pentes douces jusqu’au canal d’Hydra, qui coule à leurs pieds comme un large fleuve plutôt que comme une mer. Là on repose ses yeux sur une ou deux maisons de campagne entourées de jardins et de vergers : des champs cultivés, des groupes de châtaigniers et de chênes verts, des troupeaux, quelques paysans grecs qui travaillent à la terre. Nous lançons nos chiens et nous chassons tout le jour sur la montagne : nous revenons avec du gibier.

La ville d’Hydra, qui couvre toute la petite île de ce nom, brille de l’autre côté du canal, blanche, resplendissante, éclatante comme un rocher taillé d’hier. Cette île n’offre pas un pouce de terre à l’œil : tout est pierre ; la ville couvre tout ; les maisons se dressent perpendiculairement les unes sur les autres, refuge de la liberté du commerce, de l’opulence des Grecs pendant la domination des Turcs. On peut mesurer la civilisation croissante ou décroissante d’une nation aux sites de ses villes et de ses villages : quand la sécurité et l’indépendance augmentent, les villes descendent des montagnes dans les plaines ; quand la tyrannie et