Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/125

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la termine ; elle est moins bizarrement placée que le peu de villes grecques que nous avons vues jusqu’ici ; le gymnase, élevé par Capo-d’Istria, blanchit au milieu : — son musée ; — je n’y vais pas… je suis las des musées, — cimetière des arts ; — les fragments détachés de la place, de la destination et de l’ensemble, sont morts ; poussière de marbre qui n’a plus la vie. — Je descends seul à terre, et je passe deux heures délicieuses dans un jardin de cyprès et d’orangers appartenant à Gergio-Bey, d’Hydra. À dix heures, je rentre au vaisseau ; en descendant de l’échelle, je trouve la moitié du pont littéralement couverte de monceaux de pastèques et de melons, d’immenses paniers remplis de raisins de toutes formes et de toutes couleurs, dont quelques-uns pèsent trois à quatre livres, de figues de l’Attique, et de toutes les fleurs que la saison, le climat, peuvent fournir. On me dit que c’est le gouverneur d’Égine, Nicolas Scuffo, qui, ayant appris la veille, par mon pilote grec, mon passage par le golfe, est venu me rendre visite avec une barque pleine de ce présent de sa terre. Il a reconnu dans mon nom celui d’un ami de la Grèce, et m’a apporté le premier gage de cette prospérité que tant de cœurs généreux ont désirée pour elle. Il a annoncé son retour pour la soirée. Je demande un canot au capitaine Cuneo d’Ornano, et je vais à Égine porter mes remercîments au gouverneur ; je le rencontre en mer. Nous revenons ensemble à mon bord. Homme distingué, d’une conversation fort spirituelle : nous parlons de la Grèce, de son état futur et de sa crise présente : je vois avec chagrin que l’esprit religieux est éteint en Grèce ; le clergé, ignorant, est méprisé ; l’esprit commercial n’a pas assez de vertu pour ressusciter un peuple ; je crains pour celui-là : à la première crise européenne, il