Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/307

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uniquement par la nature à porter une ville forte. Ses flancs s’élevaient presque perpendiculairement depuis le niveau de la plaine jusqu’au sommet de cette espèce d’autel de terre ; ils ressemblaient exactement aux remparts d’une place de guerre, tracés et élevés de mains d’hommes.

Le sommet lui-même, au lieu d’être inégal et arrondi, comme tous les sommets de collines ou de montagnes, était nivelé et aplati, comme pour porter quelque chose dont il devait se couronner quand viendrait le peuple à la demeure duquel il était destiné. Dans toutes les charmantes plaines du pays de Chanaan, j’ai revu depuis ces mêmes mamelons en forme d’autels quadrangulaires ou oblongs, évidemment destinés à protéger les premières demeures d’une nation timide et faible ; et leur destination est si bien écrite dans leur forme isolée et bizarre, que leur masse seule empêche de s’y tromper, et de croire qu’ils ont été fabriqués par le peuple qui les couvrit de ses villes. — Mais une si petite nation aurait-elle jamais pu élever tant de citadelles si énormes, que les armées de Xerxès n’auraient pu en entasser une seule ? À quelque foi qu’on appartienne, il faut être aveugle pour ne pas reconnaître une destination spéciale et providentielle ou naturelle dans ces forteresses élevées à l’embouchure et à l’issue de presque toutes les plaines de la Galilée et de la Judée. Derrière ce mamelon, où l’imagination reconstruit sans peine une ville antique avec ses murailles, ses bastions et ses tours, les premières collines montaient graduellement de la plaine, portant, comme des taches grises et noires sur leurs flancs, des bosquets d’oliviers ou de chênes verts. Entre ces collines et des montagnes plus élevées et plus sombres auxquelles elles servaient