Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/334

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elles s’écartent à quelque distance du rivage, et laissent entre elles et cette mer une petite plaine basse, fertile et verte comme les plaines de Génésareth ; tantôt elles se séparent et s’entr’ouvrent, pour laisser pénétrer ses flots bleus dans des golfes creusés à leurs pieds et ombragés de leur ombre. — La main du peintre le plus suave ne dessinerait pas des contours plus arrondis, plus indécis et plus variés que ceux que la main créatrice a donnés à ces eaux et à ces montagnes ; elle semble avoir préparé la scène évangélique pour l’œuvre de grâce, de paix, de réconciliation et d’amour qui devait une fois s’y accomplir !

À l’orient, les montagnes forment, depuis les cimes du Gelboé qu’on entrevoit du côté du midi, jusqu’aux cimes du Liban qui se montrent au nord, une chaîne serrée, mais ondulée et flexible, dont les sombres anneaux semblent de temps en temps prêts à se détendre, et se brisent même çà et là pour laisser passer un peu de ciel. — Ces montagnes ne sont pas terminées à leurs sommets par ces dents aiguës, par ces rochers aiguisés par les tempêtes qui présentent leurs pointes émoussées à la foudre et aux vents, et donnent toujours à l’aspect des hautes chaînes quelque chose de vieux, de terrible, de ruiné, qui attriste le cœur en élevant la pensée. — Elles s’amoindrissent mollement en croupes plus ou moins larges, plus ou moins rapides, vêtues, les unes de quelques chênes disséminés, les autres de broussailles verdoyantes ; celles-ci d’une terre nue, mais fertile, qui offre encore les traces d’une culture variée ; quelques autres enfin, de la seule lumière du soir ou du matin qui glisse sur leur surface et les colore d’un jaune clair, ou d’une teinte bleue et violette plus riche que le pinceau ne pourrait