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de Kaïpha du pays de Nazareth et du désert du mont Thabor. Le mont Carmel, chaîne élevée de montagnes qui part du cours du Jourdain et vient finir à pic sur la mer, commence à se dessiner sur notre gauche. Sa ligne, d’un vert sombre, se détache sur un ciel d’un bleu foncé tout ondoyant de vapeurs chaudes, comme la vapeur qui sort de la gueule d’un four. Ses flancs ardus sont semés d’une forte et mâle végétation. C’est partout une couche fourrée d’arbustes, dominés çà et là par les têtes élancées des chênes ; des roches grises, taillées par la nature en formes bizarres et colossales, percent de temps en temps cette verdure, et réfléchissent les rayons éclatants du soleil.

Voilà l’aspect que nous avions à perte de vue sur notre gauche ; à nos pieds, les vallées que nous suivions descendaient en douces pentes, et commençaient à s’ouvrir sur la belle plaine de Kaïpha. Nous gravissions les derniers mamelons qui nous en séparaient, et nous ne la perdions de vue un moment que pour la retrouver bientôt. Ces mamelons, entre la Palestine et la Syrie maritime, sont un des sites les plus doux et les plus solennels à la fois que nous ayons contemplés. Çà et là, les forêts de chênes abandonnés à leur seule végétation forment des clairières étendues, couvertes d’une pelouse aussi veloutée que dans nos prairies d’Occident ; derrière la cime du Thabor s’élève comme un majestueux autel couronné de guirlandes vertes dans un ciel de feu : plus loin, la cime bleue des monts de Gelboé et des collines de Samarie tremble dans le vague de l’horizon. Le Carmel jette son rideau sombre à grands plis sur un des côtés de la scène, et le regard, en le suivant, arrive jusqu’à la mer, qui termine tout, comme le ciel dans les beaux pay-