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l’orateur est trop homme ! il n’y avait que des hymnes et des lamentations : le poëte est divin.

Quelle imagination ardente, colorée, délirante, ne suppose pas dans un pareil peuple une pareille domination de la parole chantée ? et comment s’étonner qu’indépendamment du haut sens religieux que ces poésies renfermaient, elles aient été un monument aussi accompli, aussi inimitable, de génie et de grâce ? Le prix des poëtes alors, c’était la société même. Leur inspiration leur soumettait le peuple ; ils l’entraînaient à leur gré au crime ou à l’héroïsme ; ils faisaient trembler les rois coupables ; leur jetaient la cendre sur le front, ou, réveillant le patriotisme dans le cœur de leurs concitoyens, ils les faisaient triompher de leurs ennemis, ou leur rappelaient, dans l’exil et dans l’esclavage, les collines de Sion et la liberté des enfants de Dieu. Je suis étonné que, parmi tous les grands drames que la poésie moderne a puisés dans l’histoire des Juifs, elle n’ait pas conçu encore ce drame merveilleux des prophètes. C’est un beau chant de l’histoire du monde.




Même date.


Je reviens de me promener seul sur les pentes embaumées du Carmel. J’étais assis sous un arbousier, un peu au-dessus du sentier à pic qui monte au sommet de la mon-