Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/439

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porte. Un boucher tue des moutons pour nous dans la cour. On nous descend des pains frais par une corde, du haut des terrasses. Nous recevons d’eux, par la même voie, une provision de croix, de chapelets, et d’autres pieuses curiosités, dont ils ont toujours des magasins abondamment fournis ; nous leur remettons en échange quelques aumônes, et des lettres dont leurs amis de Chypre et de Syrie nous ont chargés pour eux. Chaque objet qui passe de nous à eux est soumis d’abord à une rigoureuse fumigation, puis plongé dans un vase d’eau froide, et hissé enfin au sommet de la terrasse, dans un bassin de cuivre suspendu à une corde. Ces pauvres religieux paraissent plus terrifiés que nous du danger qui les environne. Ils ont si souvent éprouvé qu’une légère imprudence dans l’observation des règles sanitaires enlevait en peu de moments un couvent tout entier, qu’ils les observent avec une rigoureuse fidélité. Ils ne peuvent comprendre comment nous nous sommes jetés volontairement et de gaieté de cœur dans cet océan de contagion, dont une seule goutte fait pâlir. Le curé de Jérusalem, au contraire, forcé par état de courir les chances de ses paroissiens, veut nous persuader qu’il n’y a point de peste.

Après une demi-heure de conversation avec ces religieux, la cloche les appelle à la messe. Nous leur faisons nos remercîments ; ils nous adressent leurs vœux de bon voyage ; nous envoyons à notre camp les provisions et les vivres dont nous nous sommes pourvus, et nous sortons de la cour du couvent.

Après avoir descendu quelques autres rues semblables à celles que je viens de décrire, nous nous trouvâmes sur une