Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/456

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de la mort ; ayant çà et là pour bornes tumulaires les tombeaux de Josaphat et celui d’Absalon, taillés en pyramides dans le roc vif et ombragés d’un côté par les noires collines du mont des Offenses, de l’autre par les remparts du temple écroulé ; ce fut un lieu naturellement imprégné d’une sainte horreur, destiné de bonne heure à devenir les gémonies d’une grande ville, et où l’imagination des prophètes dut placer sans efforts les scènes de mort, de résurrection et de jugement. On se figure la vallée de Josaphat comme un vaste encaissement de montagnes où le Cédron, large et noir torrent aux eaux lugubres, coule avec des murmures lamentables ; où de larges gorges, ouvertes sur les quatre vents, s’élargissent pour laisser passer les quatre torrents des morts venant de l’orient et de l’occident, du septentrion et du midi ; les immenses gradins des collines s’y étendent en amphithéâtre pour faire place aux enfants innombrables d’Adam, venant assister, chacun pour sa part, au dénoûment final du grand drame de l’humanité : rien de tout cela.

La vallée de Josaphat n’est qu’un fossé naturel creusé entre deux monticules de quelques cents pieds d’élévation, dont l’un porte Jérusalem et l’autre la cime du mont des Olives ; les remparts de Jérusalem, en s’écroulant, en combleraient la plus grande partie ; nulle gorge n’y a son embouchure ; le Cédron, qui sort de terre à quelques pas au-dessus de la vallée, n’est qu’un torrent formé en hiver par l’écoulement des eaux pluviales qui dégouttent de quelques champs d’oliviers au-dessous des tombeaux des rois, et il est traversé par un pont au milieu de la vallée, en face d’une des portes de Jérusalem ; il a quelques pas de large,