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pierre est là, témoin de l’histoire. Nous passâmes, non sans reporter notre esprit à ces jours antiques où les enfants du patriarche, ces nouveaux hommes nés d’un seul homme, habitaient ces séjours primitifs, et fondaient des civilisations et des édifices qui sont restés des problèmes pour nous.

Nous employâmes sept heures à traverser obliquement la plaine qui conduit à Balbek. Au passage du fleuve qui partage la plaine, nos escortes arabes voulurent nous forcer à prendre à droite, et à coucher dans un village turc, à trois lieues de Balbek. Mon drogman ne put se faire obéir, et je fus forcé de pousser mon cheval au galop de l’autre côté du fleuve, pour forcer les deux chefs de la caravane à nous suivre. Je m’avançai sur eux la cravache à la main ; ils tombèrent de cheval à la seule menace, et nous accompagnèrent en murmurant.

En approchant de l’Anti-Liban, la plaine s’élève, devient plus sèche et plus rocailleuse. — Anémones et perce-neige, aussi nombreuses que les cailloux sous nos pieds. Nous commençons à apercevoir une masse immense qui se détachait en noir sur les flancs blanchâtres de l’Anti-Liban. C’était Balbek ; mais nous ne distinguions rien encore. — Enfin, nous arrivâmes à la première ruine. C’est un petit temple octogone, porté sur des colonnes de granit rouge égyptien, colonnes évidemment coupées dans les colonnes plus élevées, dont les unes ont une volute au chapiteau, les autres aucune trace de volute, et qui furent, selon moi, transportées, coupées et dressées là dans des temps très-modernes, pour porter la calotte d’une mosquée turque ou