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nous avions déjà couché en allant à Damas. Le scheik nous fit donner trois maisons du village. Le soleil du soir brillait sous les larges feuilles du mûrier et du figuier ; des hommes rentraient avec leurs charrues du labourage ; des femmes, des enfants circulaient dans les chemins entre les maisons, et nous saluaient avec un sourire d’hospitalité ; les bestiaux revenaient des champs avec leurs clochettes ; les pigeons et les poules couvraient les toits des terrasses, et les cloches de deux églises maronites tintaient lentement à travers les cimes de cyprès, pour annoncer les cérémonies pieuses du lendemain, qui était un dimanche ; c’était l’aspect, le bruit et la paix d’un beau village de France ou d’Italie, que nous retrouvions tout à coup au sortir des précipices du Liban, des déserts de Balbek, des rues inhospitalières de Damas : jamais transition ne fut peut-être si rapide, si douce ; nous résolûmes de passer le dimanche parmi ce beau et excellent peuple, et de nous reposer un jour de nos longues fatigues.

Journée passée à Hamana : le scheik et le marché du village nous fournissent des provisions abondantes ; les femmes de Hamana viennent nous visiter tout le jour ; elles sont infiniment moins belles que les Syriennes des bords de la mer ; c’est la race maronite pure ; elles ont toutes l’apparence de la force et de la santé, mais les traits trop prononcés, l’œil un peu dur, le teint trop coloré ; leur costume est un pantalon blanc, et par-dessus une longue robe de drap bleu, ouverte sur le devant et laissant le sein nu ; des colliers de piastres innombrables pendent autour du cou, sur la gorge et derrière les épaules. Les femmes mariées complètent ce costume par une corne d’argent d’environ un pied et quelque-