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12 avril 1833.


Descendu à Tripoli de Syrie avec le scheik et sa tribu ; je donne à son fils une pièce d’étoffe de soie pour faire un divan. Passé un jour à parcourir les délicieux environs de Tripoli ; reparti pour Bayruth par le bord de la mer ; passé cinq jours à embarquer nos bagages sur le brick que j’ai affrété, la Sophie ; préparatifs faits pour une tournée en Égypte ; adieux à nos amis francs et arabes ; je donne plusieurs de mes chevaux ; j’en fais partir six des plus beaux sous la conduite d’un écuyer arabe et de trois de mes meilleurs saïs, pour qu’ils aillent, en traversant la Syrie et la Caramanie, m’attendre le 1er juillet au bord du golfe de Macri, vis-à-vis l’île de Rhodes, dans l’Asie Mineure.

Au point du jour, le 15 avril 1833, nous sortons de la maison où Julia nous embrassa pour la dernière fois, et nous quitta pour le ciel ! Pavé de sa chambre baisé mille fois et trempé de tant de larmes : cette maison était pour moi comme une relique consacrée ; je l’y voyais encore partout : oiseaux, colombes, son cheval, le jardin, les deux belles jeunes filles syriennes qui venaient jouer avec elle, et qui logent sous nos fenêtres dans le jardin. Elles se sont levées avant le jour, et vêtues de leurs plus riches parures : elles pleurent ; elles élèvent leurs mains vers nous, et arrachent les fleurs de leurs cheveux ; je leur donne à chacune, pour souvenir des amis étrangers qu’elles ne reverront plus que