Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/34

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et la plus religieuse relique des collines de Sion ; mais il faut que les hommes gâtent toujours un peu tout ce qu’ils touchent. Hélas ! s’ils avaient altéré et gâté seulement les pierres et les ruines de ces scènes visibles ! Mais que n’ont-ils pas fait des doctrines, des exemples de cette religion de raison, de simplicité, d’amour et d’humilité, que le Fils de l’homme leur avait enseignée au prix de son sang ? Quand Dieu permet qu’une vérité tombe sur la terre, les hommes commencent par maudire et par lapider celui qui l’apporte, puis ils s’emparent de cette vérité qu’ils n’ont pu tuer avec lui parce qu’elle est immortelle ; c’est sa dépouille, c’est leur héritage : mais, comme la pierre précieuse que les malfaiteurs enlèvent au pèlerin céleste, ils l’enchâssent dans tant d’erreurs qu’elle devient méconnaissable, jusqu’à ce que le jour brille de nouveau sur elle, et que, séparant après des siècles le diamant de son entourage, la sagesse dise : « Voilà le vrai, voilà le faux : ceci est la vérité, ceci est l’erreur ! » Voilà pourquoi toutes les religions ont deux aspects dont l’association étonne les esprits ; l’un populaire : légendes, superstitions, alliage dont les siècles d’ignorance et de ténèbres mêlent et ternissent la pensée du ciel ; l’autre vrai, philosophique, que l’on découvre en effaçant de la main la rouille humaine, et qui, présenté au jour éternel, qui est la conscience, la réfléchit pure, et éclaire toute chose et toute intelligence de cette lumière de vérité et d’amour au fond de laquelle on voit et l’on aime l’Être évident, Dieu !