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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/400

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mandement, de vous ou de moi. » Ces paroles blessèrent Cais. Entraîné par le ressentiment, il s’échappa de dessous ses étendards et se rua sur Hadifah. Ce fut alors que ces deux chefs, animés par une haine mutuelle, combattirent ensemble de dessus leurs nobles coursiers jusqu’à la nuit. Cais était monté sur Dahis, et Hadifah sur Ghabra. Dans le cours de ce combat il se passa des faits d’armes qui n’avaient jamais été vus auparavant. Chaque tribu désespérait de son chef, et elles voulaient faire une attaque générale, afin de suspendre leurs efforts et diminuer la fureur qu’ils mettaient à se combattre. Alors les cris commencèrent à se faire entendre dans les airs. Les cimeterres furent tirés, et les lances s’avançaient entre les oreilles des chevaux arabes. Antar s’approcha de quelques chefs absiens, et leur dit : « Attaquons ces lâches. » Ils allaient partir, quand les anciens des deux tribus s’avancèrent au milieu de la plaine, la tête découverte, les pieds nus, et les idoles[1] suspendues à leurs épaules. Placés entre les deux armées, ils parlèrent ainsi : « Parents et alliés, au nom de l’union qui a régné jusqu’ici entre nous, ne faisons rien qui nous rende la fable de nos esclaves. Ne fournissons pas à nos ennemis et à nos envieux une occasion de nous faire de justes reproches. Oublions tout sujet de dispute et de dissension. Des femmes ne faisons point des veuves, ni des enfants des orphelins. Satisfaites votre ardeur pour les combats en attaquant ceux d’entre les Arabes qui sont vraiment nos ennemis. Et vous, parents de Fazarah, montrez-vous plus humbles envers vos frères les Absiens. Surtout n’oubliez pas que l’outrage a souvent causé la perte de maintes tribus, qui se sont repen-

  1. Le texte arabe porte quelquefois leurs enfants en bas âge.