à la vie du chef légal de la nation. Cet ordre conduisit Louis XVI à l’échafaud, car il ramena au peuple sa victime échappée. « Heureusement pour lui, écrit-il dans ses Mémoires, après les atrocités éprouvées par ces augustes victimes, heureusement pour lui, ce ne fut pas à ses ordres, mais à l’accident d’être reconnu par un maître de poste et à de mauvais arrangements, que fut due leur arrestation. » Ainsi, le citoyen ordonnait ce que l’homme tremblait de voir accomplir, et plus tard la sensibilité protestait contre le patriotisme.
En sortant des Tuileries, La Fayette se rendit à cheval à l’hôtel de ville. La foule inondait les quais ; sa colère éclatait en invectives contre lui. Il l’affronta avec sérénité. Arrivé sur la place de Grève presque seul, il y trouva le duc d’Aumont, un de ses chefs de division, entre les mains du peuple prêt à le massacrer. Il fendit la foule étonnée de son audace ; il délivra le duc d’Aumont. Il reprit de force l’empire que l’hésitation lui faisait perdre avec la vie. « De quoi gémissez-vous ? dit-il à la foule. Chaque citoyen ne gagne-t-il pas 20 sous de rente à la suppression de la liste civile ? Et si vous appelez la fuite du roi un malheur, de quel nom appelleriez-vous donc une contre-révolution qui vous priverait de la liberté ? » Il ressortit de l’hôtel de ville sous escorte, et se rendit avec plus de confiance à l’Assemblée. À son entrée dans la salle, Camus, auprès de qui il alla s’asseoir, se leva avec indignation : « Point d’uniforme ici ! s’écrie-t-il ; nous ne devons point voir d’uniforme ni d’armes dans cette enceinte ! » Quelques membres du côté gauche se lèvent avec Camus, crient à La Fayette : « Hors de la salle ! » et renvoient du geste le général intimidé. D’autres membres, amis de La Fayette, se précipitent autour de lui