vengeances. Il est las d’être tour à tour bravé ou trahi ; si ma voix est étouffée ici, si nos ménagements toujours faibles pour les ennemis de la patrie la mettent perpétuellement en danger, j’en appelle au jugement de la postérité ; c’est à elle à juger entre vous et moi. »
M. de La Fayette, sommé de s’expliquer, ne répondit pas à ces interpellations pressantes : il dit seulement qu’il venait se réunir à la société des Jacobins, parce que c’était là que les bons citoyens devaient accourir dans des temps d’alarmes, et il sortit de l’Assemblée. L’Assemblée ayant pris le lendemain un arrêté pour enjoindre au général de venir se justifier, il écrivit qu’il irait plus tard. Il ne vint jamais. Mais les motions de Robespierre et de Danton ne portèrent point atteinte à son crédit sur la garde nationale. Danton, ce jour-là, paya d’audace. M. de La Fayette avait sur les lèvres les preuves de la vénalité de cet orateur. Il avait reçu de M. de Montmorin cent mille francs. Danton savait que M. de La Fayette n’ignorait pas ce marché ; mais il savait aussi que M. de La Fayette ne pouvait l’accuser sans perdre M. de Montmorin, et sans risquer d’être accusé lui-même de participation à ce commerce des caractères qu’alimentaient les fonds de la liste civile. Ces deux secrets s’intimidèrent l’un l’autre, et forcèrent le tribun et le général à des réticences qui amortirent le combat. Lameth répondit à Danton, et parla dans le sens de la concorde. Les résolutions violentes proposées par Robespierre et par Danton ne prévalurent pas ce jour-là aux Jacobins. Le péril servit de sagesse au peuple. Son instinct lui défendit de diviser les forces devant l’inconnu.