gales ce que l’air libre est à l’air enfermé. Tandis que l’air de ces assemblées s’épuisait dans l’enceinte du gouvernement établi, l’air du journalisme et des sociétés populaires s’imprégnait et s’agitait sans cesse d’un principe inépuisable de vitalité et de mouvement. On croyait à la stagnation dedans, mais le courant était dehors.
La presse, dans le demi-siècle qui avait précédé la Révolution, avait été l’écho élevé et serein de la pensée des sages et des réformateurs. Depuis que la Révolution avait éclaté, elle était devenue l’écho tumultueux et souvent cynique des passions populaires. Elle avait transformé elle-même les procédés de communication de la pensée ; elle ne faisait plus de livres, elle n’en avait pas le temps ; elle se répandait d’abord en brochures, et plus tard en une multitude de feuilles volantes et quotidiennes qui, disséminées à bas prix parmi le peuple ou affichées gratuites sur les murs des places publiques, provoquent la foule à les lire et à les discuter. Le trésor de la pensée nationale, dont les pièces d’or étaient trop pures ou trop volumineuses pour l’usage du peuple, s’était, pour ainsi dire, converti en une multitude de monnaies de billon, frappées à l’empreinte de ses passions du jour et souvent souillées des plus vils oxydes. Le journalisme, comme un élément irrésistible de la vie d’un peuple en révolution, s’était fait sa place à lui-même sans écouter la loi qui s’était efforcée de l’entraver.
Mirabeau, qui avait besoin du retentissement de la parole dans les départements, avait créé ce porte-voix de la Révolution, malgré les arrêts du conseil, dans les Lettres à mes commettants et dans le Courrier de Provence. À l’ouverture des états généraux et à la prise de la Bastille, d’autres journaux avaient paru. À chaque insurrection nou-