question des émigrés. Le roi et les ministres les avaient prévenus. Aussitôt après l’acceptation de la constitution, Louis XVI avait formellement renoncé à toute conjuration intérieure ou extérieure pour recouvrer sa puissance. La toute-puissance de l’opinion l’avait convaincu de la vanité de tous les plans qu’on lui présentait pour la vaincre. Le calme momentané des esprits après tant de secousses, l’accueil dont il avait été l’objet à l’Assemblée, au Champ de Mars, au théâtre ; la liberté et les honneurs qu’on lui avait rendus dans son palais, l’avaient persuadé que si la constitution avait des fanatiques, la royauté n’avait pas d’implacables ennemis dans son royaume. Il croyait la constitution exécutable dans beaucoup de ses dispositions, impraticable dans quelques autres. Le gouvernement qu’on lui imposait lui semblait une expérience pour ainsi dire philosophique que la nation voulait faire avec son roi. Il n’oubliait qu’une chose : c’est que les expériences des peuples sont des catastrophes. Un roi qui accepte des conditions de gouvernement impossibles accepte d’avance son renversement. L’abdication réfléchie et volontaire est plus royale que cette abdication journalière à subir par la dégradation du pouvoir. Un roi y sauve, sinon sa vie, du moins sa dignité. Il est plus séant à la majesté royale de descendre que d’être précipitée. Du moment qu’on n’y est plus roi, le trône est la dernière place du royaume.
Quoi qu’il en soit, le roi témoigna franchement à ses ministres l’intention d’exécuter loyalement la constitution et de s’associer sans aucune réserve ni arrière-pensée aux volontés et aux destinées de la nation. La reine elle-même, par un de ces retours imprévus et fugitifs du cœur des femmes, se jeta avec la confiance du désespoir dans le