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commune rapproche les hommes ; l’individualisme cesse, et l’association légale ou illégale organise la passion publique. Les sociétés populaires étaient nées ainsi : aux premières menaces de la cour contre les états généraux, quelques députés bretons s’étaient réunis à Versailles et avaient formé une société pour éclairer les complots de la cour et assurer les triomphes de la liberté ; ses fondateurs étaient Sieyès, Chapelier, Barnave, Lameth. Après les journées des 5 et 6 octobre, le club Breton, transporté à Paris à la suite de l’Assemblée nationale, y avait pris le nom plus énergique de Société des Amis de la Constitution ; il siégeait dans l’ancien couvent des Jacobins-Saint-Honoré, non loin du Manége, où siégeait l’Assemblée nationale. Les députés, qui l’avaient fondé, dans le principe, pour eux seuls, en ouvrirent les portes aux journalistes, aux écrivains révolutionnaires, et enfin à tous les citoyens. La présentation par deux des membres de la société et un scrutin ouvert sur la moralité du récipiendaire, étaient les seules conditions de réception ; le public était admis aux séances par des censeurs qui inspectaient la carte d’entrée ; un règlement, un bureau, un président, une correspondance, des secrétaires, un ordre du jour, une tribune, des orateurs, transportaient dans ces réunions toutes les formes des assemblées délibérantes ; c’étaient les assemblées du peuple, moins l’élection et la responsabilité ; la passion donnait seule le mandat ; au lieu de faire les lois, elles faisaient l’opinion.

Les séances avaient lieu le soir, afin que le peuple ne fût pas empêché d’y assister par les travaux du jour ; les actes de l’Assemblée nationale, les événements du moment, l’examen de questions sociales, plus souvent les accusations contre le roi, les ministres, le côté droit, étaient