Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tassait sa fenaison pour qu’elle ne fût pas délavée par l’eau. Il parut me revoir avec plaisir. Je déposai ma veste de chasse sur une pierre, et je l’aidai à achever son ouvrage comme si j’avais été du métier. Il ne fit aucune façon pour m’en empêcher. Avant midi, tout le foin était amoncelé çà et là sur la pente tondue du petit pré. Il m’offrit un morceau de son pain de seigle et un de ses petits fromages de chèvre, assaisonnement du paysan dans toutes nos montagnes. Je rompis avec plaisir ce pain de mon enfance avec lui. Le repas, arrosé de l’eau glacée de la source, puisée dans une gourde, et du jus de quelques cerises précoces, piquées du ver et tombées de l’arbre avant l’heure, accrut entre nous la familiarité. Quand on a bu et mangé ensemble, on est compère dans la langue et dans les mœurs du pays. Nous nous assîmes sous un des monceaux de foin, dont le sommet donnait un peu d’ombre à nos têtes, et nous reprîmes la conversation du dimanche précédent.