Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/138

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compagnie. Elle était, quoique enfant, comme ces mères de plusieurs enfants qui paraissent n’avoir un cœur et des yeux que pour le plus faible et le plus infirme. C’est encore une bonté de Dieu qui met souvent un contre-poids de bien là où il a mis un poids de mal. Ma mère avait dit à Denise en la prenant à la maison : « Tu auras soin de ton cousin l’aveugle, tu le désennuieras à la maison, tu le mèneras aux champs avec toi, tu lui apprendras le nom des bêtes, tu le remettras dans son sentier quand il se trompera de mur, tu le retourneras devant son sillon quand il voudra piocher ou semarder l’enclos avec nous, tu iras lui chercher une poignée de chanvre au grenier quand il aura fini de tiller la sienne. » Denise avait fait ce qu’on lui avait dit, d’abord, toute jeune, par obéissance, et puis, plus âgée, par bon naturel. Ils avaient l’air, lui et elle, de deux jumeaux qui ne se seraient jamais quittés depuis le ventre de la mère.

XIII.

Gratien ne pouvait pas plus se passer d’elle, qu’elle de lui. Quand elle sortait le matin à peine vêtue