Page:Lamartine - Méditations poétiques (édition de 1820).djvu/44

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La terre notre exil, et le ciel son séjour.
Ah ! si dans ces instants où l’ame fugitive
S’élance et veut briser le sein qui la captive,
Ce Dieu, du haut du ciel répondant à nos vœux,
D’un trait libérateur nous eût frappés tous deux !
Nos âmes, d’un seul bond remontant vers leur source,
Ensemble auraient franchi les mondes dans leur course
A travers l’infini, sur l’aile de l’amour,
Elles auraient monté comme un rayon du jour,
Et, jusqu’à Dieu lui-même arrivant éperdues,
Se seraient dans son sein pour jamais confondues !
Ces vœux nous trompaient-ils ? Au néant destinés,
Est-ce pour le néant que les êtres sont nés ?
Partageant le destin du corps qui la recèle,
Dans la nuit du tombeau l’ame s’engloutit-elle ?
Tombe-t-elle en poussière ? ou, prête à s’envoler,
Comme un son qui n’est plus va-t-elle s’exhaler ?
Après un vain soupir, après l’adieu suprême
De tout ce qui t’aimait, n’est-il plus rien qui t’aime ?
Ah ! sur ce grand secret n’interroge que toi !
Vois mourir ce qui t’aime, Elvire, et réponds-moi !