Page:Lamartine - Recueillements poétiques, épitres et poésies diverses, 1888.djvu/102

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SAUL.

Ah ! je lis mon arrêt sur toute la nature !
In fantôme implacable agite mon sommeil.
Un fantôme implacable assiège mon réveil.
Mille songes affreux, sans liaison, sans suite,
Sont présents à toute heure à mon âme interdite :
Un jeune homme expirant sous un coup inhumain !...
Un vieillard malheureux se perçant de sa main !...
Un trône en poudre... un roi dont le destin s’achève,
Un astre qui s’éteint... un autre qui se lève...
De la joie et du sang !... un triomphe !... un cercueil !...
Et des chants de victoire ! et des accents de deuil !
Ce désordre confus et ces sombres images
Peut-être du sommeil sont-ils les vains ouvrages.
J’ai fait pour les lier des efforts superflus :
Mon fils, depuis longtemps Dieu ne m’éclaire plus !


JONATHAS.

Demandez-lui, seigneur, sa force et sa lumière ;
Espérez tout de lui !


SAUL.

                               Que veux-tu que j’espère ?
Où sont mes défenseurs ? où sont mes compagnons ?
Le glaive a moissonné leurs vaillants bataillons ;
Au milieu des combats ils sont tombés sans vie :
Je foule leur poussière, et je leur porte envie !
Ils sont morts sans leur frère en vengeant leur pays !
C’est moi qu’il faut pleurer, puisque je leur survis !
Quel appui, Dieu puissant, reste-t-il à ta cause ?
Sur quel héros faut-il que mon bras se re