Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/237

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je restai vingt jours en attendant le retour du messager que j’avais envoyé à Alep. J’avais grand besoin de ce repos et de cette occasion de renouveler mon habillement, qui tombait en lambeaux ; mais je faillis y rester plus longtemps que je ne voulais ; car la nouvelle se répandit que l’armée des Wahabis avait envahi le désert de Damas et ravagé plusieurs villages, massacrant les hommes et les enfants jusqu’au dernier, et n’épargnant que les femmes, mais après les avoir dépouillées. Le scheik de Coriétain, hors d’état de faire la moindre résistance, fit fermer les portes de la ville, défendit d’en sortir, et attendit les événements en tremblant.

Nous apprîmes bientôt que l’ennemi ayant attaqué Palmyre, les habitants, retirés dans l’enceinte du temple, s’y étaient défendus avec succès, et que les Wahabis, ne pouvant les y forcer, s’étaient contentés de tuer les chameliers et d’enlever les troupeaux. De là ils étaient allés piller le village d’Arack et s’étaient répandus dans les environs. Ces sinistres nouvelles m’alarmèrent beaucoup sur le sort de mon messager, qui arriva cependant sain et sauf avec l’argent de Scheik-Ibrahim. Il s’était réfugié quelque temps à Saddad, dont les habitants, ayant payé une assez forte contribution, n’avaient rien à craindre pour le moment. Je profitai de cette circonstance ; et, quittant mes habits de Bédouin, je m’habillai comme un chrétien de Saddad, et gagnai ce village, où j’obtins des nouvelles du drayhy, campé à Ghaudat-el-Cham avec la tribu de Bargiass. Je me rendis auprès de lui le plus promptement possible, et j’appris là avec chagrin qu’une coalition redoutable s’était formée entre Mehanna-el-Fadel et la tribu du pays de Samarcande. Ils avaient noué des intrigues avec les gouverneurs de Homs