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cerveau déserté pour le temps de l’âge viril, débordant le surplus de ses capacités vers les plaisirs raisonnés ou mondains, mais cela aussi n’a qu’un temps, et bientôt les premiers souvenirs reviennent pour y demeurer jusqu’à la fin que doit emporter le dernier souffle de la vie.

C’était depuis peu que la famille du petit vieux était arrivée au village. L’air grave de ce dernier, ces propos remplis de sages avis, toujours de haute moralité et de bon ton, lui avaient vite fait gagner l’estime et la considération des gens des voisinages.

Tous les matins le vieillard sortait faire le pas sur la rue, rencontrait-il un homme âgé, il s’arrêtait, regardait passer puis continuait son petit bout de chemin. Il se rendait d’ordinaire à la quatrième maison de chez lui, là il s’arrêtait pour y trouver, occupé à s’amuser, un petit bonhomme de six à sept ans, aux yeux clairs et vifs, à l’air crâne et rieur et ne manquait pas de lui adresser la parole ; les réponses sensées de l’enfant l’amusaient et lui procuraient un passe-temps très agréable.

Un jour que l’enfant jouait dans sa cour par un faux mouvement il imprime à sa balle une mauvaise direction, celle-ci s’en alla rouler dans la rue ; vite l’enfant s’empresse d’aller la quérir, le vieillard survenant en ce moment l’arrête et veut lui parler ; le petit garçon commence à répondre d’aplomb à ces questions, mais à mesure que l’entretien se prolonge il semble ennuyé.

Tout-à-coup, prenant une décision, il brusque l’entretien et dit au vieillard : « Voulez-vous voir un