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LAIDE

entendras, nourrice : j’aime avec passion Guy Romain, dont je suis la femme, et qui me refuserait pour maîtresse !

— Vous l’aimez ainsi depuis longtemps, repartit la vieille Joséphine d’une voix grave. Vous l’avez aimé toujours, vous l’aimerez sans cesse. Maintenant, attachée à lui par cet affreux mariage, vous ne pourrez le fuir, et son retour ne vous apportera que l’aggravation de votre peine.

— Le cruel jamais, sans grâce, sans clémence, s’écrit dans mon cerveau vide. Il se dresse en arrière de ma vie, par de la mes premières années, en avant jusqu’aux dernières. Je ne verrai plus que ce mot, sans cesse retracé, autour de moi : jamais, jamais !

— Jamais ! répéta la nourrice qui se frappait la poitrine pour en faire sourdre une consolation.

Hélène, appuyée, presque assise au pied de son lit, maigre et osseuse dans son vêtement de nuit, regardait avec un sombre chagrin les reflets de ses miroirs lui renvoyer son désagréable visage.

— Non, s’écria la malheureuse laide, les fem-